lundi 29 mars 2010

semaine 3: le marché aux puces

Midi. Je me force à me lever même si je n’ai dormi que cinq heures. Je n’ai trouvé personne pour m’accompagner à ma troisième sortie de l’Affaire 52, qu’importe. Je suis une grande fille.
Il y a quelques jours, mon amie Audrey est devenue adepte d’une page Facebook qui se nomme ‘du design, du rétro et du kitsch au Marché aux puces St-Michel’. Je suis allée niaiser sur cette page et j’ai vu des photos d’objets vraiment, vraiment beaux. Et comme cette semaine je n’avais que mon dimanche à consacrer à mon activité insolite hebdomadaire et que habituellement, les dimanche, je suis claquée, j’ai décidé d’aller au marché aux puces St-Michel. C’est pas trop forçant. C’était d’ailleurs ma première fois dans un marché aux puces; j’ai déjà fait les bazars de sous-sol d’églises, les entrepôts de l’Armée du Salut, du Renaissance, et tralala, et j’avais toujours rêvé d’aller au marché aux puces. Le nom m’attire, étonnamment.
Le marché aux puces St Michel, en gros, est la même chose qu’un sous-sol d’église, mais en vraiment plus intense. La page Facebook est traître : la plupart des objets qui sont à vendre sont laids et il y en a tellement que c’est juste écoeurant se promener là dedans et essayer de trouver quelque chose de beau. Dès mon entrée, je me suis fait accueillir par Micheal Jackson, il a capté mon œil, de là haut, à 3 mètres du sol (qui met un 33 tours à vendre à 3 mètres du sol?). C’est un vrai fouillis et une odeur de vieux et d'humidité flotte dans l’air. Je prends une vitesse de 2 km/h et commence à regarder attentivement. Je vois des racks de vieux vêtements et deux ou trois hipsters qui passent à travers, des milliers de 33 tours poches, même la collection de Céline Dion en 33 tours! J’ai vu un vieux livre érotique des années 50; je n’ai pas pu regarder à l’intérieur parce qu’il était dans une petite enveloppe de plastique bien scellée, et depuis je me demande incessamment de quoi ç'a l’air, de la littérature érotique des années 50. Et il y a beaucoup d’autres livres aux titres accrocheurs, comme par exemple ‘La femme solaire’. Il y a des kiosques qui ont de la musique, d’autres la télé avec des films qui jouent, il y a des toilettes, une cuisine/salle à manger où je n’irai jamais manger tellement ça a l’air précaire. Ce week-end : le couscous en spécial à 4,50$. Il y a une pièce un peu cachée à droite qui contient les gros meubles : buffets, tables et compagnie, à gauche à l’autre bout, une salle de billard tellement glauque que je n’ai même pas osé entrer. J’ai vu de vieilles poupées Bout d'Choux brunâtres, plein d’animaux et de reptiles empaillés (les reptiles : ouach!), et même un vrai Jean Paul Lemieux à 850$. Des effluves de cigarettes me viennent au nez : et poc, un autre endroit nullement touché par la loi anti-tabac.
Je monte au deuxième étage. Déjà, c’est un peu mieux, c’est plus aéré, il y a moins de babioles qu’en bas; il y en a encore plein, mais moins. Peut-être que c’est juste le plafond plus haut et la lumière plus claire qui donne cette impression. Juste à côté du marché aux puces St-Michel, il y a un bowling, et on l’entend en bruit de fond. Et quand je dis bruit de fond, je suis généreuse, en fait, je pourrais plus dire qu’on dirait qu’on est dans la salle de quilles. Je me promenais dans les allées quand j’entends une madame qui parle plus fort que tout le monde :
- Non, mais c’est pour ma cuisine, je le mettrais dans ma cuisine. Faut que j’essaie de l’imaginer là, tsé.
Curieuse de voir de quel objet elle parle, je m’approche sans aucune subtilité. C’est un énorme cadre en genre de dessin années 80, vous savez, ces dessins avec des petits crachottis en reliefs et quelques lignes en diagonales dans un coin, typique de ces merveilleuses années? Il représente un gros vase rond avec des fleurs, avec les couleurs jaune épi de maïs sale, bleu marin, gris et bourgogne. Le cadre tout mince est en or. Bref, c’est vraiment laid. J’espère qu’elle n’a pas remarqué mon haussement de sourcils; je n’arrive encore pas à croire que quelqu’un peut trouver quelque chose comme ça agréable à regarder tous les jours… Et là, j’ai vu la chose qui m’a convaincu que j’avais fait le bon choix d’activité pour cette semaine : un cadre avec le dessin de Laurel et Hardy… avec leurs prénoms! Mister Laurel se prénomme Stan, et Monsieur Hardy, Olivier. Priceless. Je sais que j’aurais pu trouver ça sur Internet en moins de cinq secondes, mais c’est bien mieux comme ça, non?
Maintenant, je me dois de parler de la chose la plus choquante que j’ai vu : les prix. Une vieille photo de six par quatre pouces d’une équipe de basket dans un cadre pété : 60$. Une vieille télé 24 pouces : 85$. Une vulgaire table carrée, sans rien de spécial : 250$. Le genre de truc qu’on peut acheter au Village des Valeurs pour 35$... le pire c’est que je suis sûre que certain d’entre eux font ça : faire le tour de ces magasins là, acheter les beaux trucs pas trop cher et les revendre à 300%. Moi qui est une dépensière invétérée et avouée, je suis ressortie de là avec seulement deux couteaux d’office neufs pour 14$, et 'Cendrillon' et 'La belle au bois dormant' en VHS pour 5$. Déception. Je m'attendais à trouver facilement une belle table de travail pas trop chère pour mettre dans mon bureau...
Donc, les amis, ne vous cassez pas la tête à aller jusqu’au marché aux puces St-Michel, rendez vous plutôt à l’Armée du Salut, au Chaînon sur la rue St-Laurent ou au Renaissance, d’autant plus que ces endroits ont une conscience sociale...