mercredi 18 août 2010

semaine 20: le Duché de Bicolline

Bon.  Je sais qu'à la semaine 9 (le Salon de la Passion Médiévale) j'avais clamé haut et fort que jamais je n'irai à Bicolline.  Il ne faut jamais dire jamais.

L'acolyte de ma vie, Karine, voulait terriblement y aller, et c'est elle qui m'a convaincue de s'y rendre pour vivre le trip médiéval à fond.  Au départ, on était quatre (deux gars et deux filles) alors on a imaginé toutes sortes de costumes qui incluait quatre personnes: les trois petits cochons et le grand méchant loup (y'avait des cochons et des loups, à l'ère médiévale, hein).  Puis après une soirée bien arrosée, on a décidé qu'on irait déguisés en vulves, on s'était même trouvé des noms: Crackvula et Vulvictine pour les filles, Vagenthor et Vulvotron pour les gars, et notre nom de bande aurait été Vuvectomus.  On voulait avoir des genre de costumes beiges rosés, style écureuils volants, avec un cercle noir sur notre ventre représentant le vagin et notre face aurait été le clitoris.  Puis on s'est dit que c'était trop compliqué à faire, et à ce moment on a perdu un joueur... puis deux... maudits gars, tous des chokeurs.  Alors Karine et moi avons voulu y aller en Lady Gaga; une mission totalement impossible, donc nous avons sorti de notre coffre à costumes des robes et des capes, et je me suis déguisée en noir et elle en bleu.  On a décidé que j'étais une mage et elle une magicienne (presque la même chose, mais bon, ça sonnait bien).  C'est vraiment moins cher et comme ça, on allait mieux se fondre dans la foule.  On a quand même emporté le masque de Santana et celui du Père Noël cochon, pour faire des photos drôles.

Santana
La veille de notre départ, j'ai réalisé qu'il fallait s'inscrire des MOIS à l'avance, et j'ai freaké un peu.  J'ai envoyé un email au Duché de Bicolline leur demandant s'il voulait bien me laisser y aller en tant que reporter 33mag, et j'ai demandé à mon rédacteur en chef de 33mag de me faire une lettre officielle me permettant un p'tit lousse, si jamais on ne réussissait pas à entrer.  Et j'ai vraiment bien fait. 

On est parti de Montréal vers les 19h. On a pogné de la pluie et des orages violents, et Karine m'a cassé les oreilles avec toute la musique des années 80 qu'elle a pu trouver sur mon iPod.  On s'est arrêtées sur le bord de la route pour se costumer, se prendre en photo et rire, rire, et rire encore.  On s'est perdues une, deux, mille fois, on a reviré de bord, retourné sur nos pas, failli écraser deux bébés ratons laveurs vraiment cutes, bref, c'est pas facile trouver des routes quand elles changent de nom, on a dû débarquer dans des dépanneurs trois fois plutôt qu'une pour demander notre chemin (toujours costumées) on est arrivées là à 23h.  On venait tout juste de se stationner et un bédouin est venu cogner à ma fenêtre pour me dire que je ne pourrais pas rester là.  Bon.  Puis, l'organisatrice en chef est venue nous parler.
Le Père Noël cochon

- Qui êtes vous? Pourquoi vous êtes là?

- Euh, on vient à Bicolline, j'ai dit.

- Vous n'êtes pas sur les journées d'inscriptions, c'est lundi, mercredi et vendredi.  Vous ne pouvez pas rester, elle a dit, méchante comme tout.

Bon, elle sera pas facile, elle.  J'ai sorti ma précieuse lettre et patiné un peu:

- Je vous ai envoyé un email hier, j'écris pour 33mag, je viens observer comment se déroule le festival, si ça vous dérange qu'on reste, on va juste aller regarder pendant deux heures, genre, et on va repartir tout de suite...

Et on l'a suppliée pendant un bon cinq minutes.  Elle nous a dit de l'attendre là, qu'elle allait regarder ce qu'elle pouvait faire, et qu'elle allait revenir nous voir.  Derrière nous, il y avait une clôture de bois, style Astérix, à travers les fentes du bois on voyait une scène et plein de lumières et on entendait le spectacle qui jouait. Teaser médiéval à fond.

Deux minutes plus tard, elle est revenue:

- Bon, je t'avais répondu par email que c'était pas possible, mais c'est ok pour cette fois-ci, et on ne vous donne pas plus qu'une heure.  Tu vas me donner tes clés de char et une pièce d'identité, et si dans une heure, t'es pas revenue, ton char, tu le revois pu, elle a dit d'un ton menaçant.

- Je vais te donner mon porte-feuille au complet, mon ADN et mon empreinte de doigt, si tu veux.  Mais merci, merci beaucoup de nous laisser aller voir... ça nous aurait fait chier de faire toute cette route pour rien.

le chemin du Roy: de circonstance
Ça jouait dur.  Puis, elle nous a dit qu'on allait avoir un guide qui allait nous suivre tout au long de la visite (je me suis demandé pourquoi elle me tourmentait de me voler ma voiture si on était surveillées de près comme ça... anyway.  J'attends toujours son email de refus, ceci dit.)

- Salut, je m'appelle Thomas, a dit notre guide, qui à première vue avait l'air fort sympathique.

On les a remerciés encore, et on est entrées.  

Magique, c'est magique.  Ce n'est rien à comparé du Salon de la Passion Médiévale.  Ce dernier est vraiment trash comparé à Bicolline: là, ça sentait bon et frais: de bonnes odeurs de feu de camp et d'épinette; il y avait des torches allumées partout au bord des chemins, une brume épaisse recouvrait le tout, je me sentais vraiment dans une autre époque.  Ça ressemblait aux scènes de villages du Seigneur des Anneaux.  Aucun cellulaire, appareil photo, ou autre engin technologique, des mamans donnaient le seins à leurs bébés costumés, des enfants jouaient à la tag, fuck le x-box.  Plusieurs petites maisons de bois construites à la main s'élevaient de part et d'autre, comme un vrai petit village, pas de vitres, que des volets ouverts, quelques tentes de toiles blanches, et beaucoup de groupes de gens réunis autour d'un feu.

des troubadours
- Au départ, il y avait 300 personnes qui venait ici, et après quinze ans, c'est 2000 personnes qui viennent à chaque année, c'est plus de 150 bâtiments -tous construits selon les normes, d'ailleurs, les pompiers viennent checker tout ça à chaque été, c'est presque un demi kilomètre de diamètre, et beaucoup, beaucoup d'activités à chaque jour.

- Est ce que c'est ici qu'a été tourné L'âge des ténèbres? j'ai demandé.

- Non, c'est une autre place un peu dans le même genre, mais là bas il y a un château, a répondu Thomas.

Il n'y a aucune personne qu'on a croisé qui n'était pas en costume médiéval.  Thomas était un merveilleux guide, il répondait joyeusement à toutes nos questions, même les plus connes, du genre: ''est ce que y'a des blessés graves quand il y a des batailles, ou des personnes en coma éthylique quand vous faites la fête?'' (non et non) ou ''est ce que le monde fourrent partout?'' (non)...  à un moment, Thomas s'est fait arrêté par un bougre en cape noire (on a jamais vu son visage) et il a dû nous faire patienter le temps qu'il retrouvait son alter-ego médiéval et réglait quelques comptes avec cet individu.  On lui a demandé son nom de personnage:

- Gora le Putois, sinon, je suis maréchal, comme en ce moment, quand je porte mon dossard jaune et mon walkie-talkie.  Et vous, d'ailleurs, c'est quoi vos noms? nous a-t-il demandé, amusé, avec un ton inquisiteur.
Isabella la Mage Noire

-Euh.... je suis Isabella la Mage Noire, j'ai dit.

- Et moi je suis Violaine la Magicienne Bleue! a dit Karine.

Puis il nous a emmenées devant l'agora:

- Ici, il y a des joutes, des cracheurs de feu, des conteurs, des troubadours, toutes sortes de spectacles, d'ailleurs, hier, il y avait une fille qui chantait avec son groupe devant sa tente, et on parle d'une fille qui a une formation en chant classique, là, et on lui a demandé si elle voulait bien nous faire un spectacle vendredi soir à l'agora, et elle a accepté.

Karine était comblée, elle qui adore chanter.

- Je veux revenir ici l'année prochaine, rester deux ou trois jours et chanter! elle m'a dit.

- Oui oui, Violaine! j'ai répondu en riant un peu d'elle.

Une heure, c'est vite passé.  Thomas a reçu un message dans son walkie-talkie qui lui disait de nous ramener à l'accueil.  J'ai repris mes clés et mon permis de conduire (elle n'avait pas volé mon auto, finalement) et on est venues pour partir, mais des dudes avaient vidé le coffre de leur voiture juste derrière la mienne.


- Eh!  C'est quoi vos noms, à vous? leur a demandé Karine.

- Lui, c'est Loco, et moi, c'est Grand Chien, a répondu le plus gros.  Loco, c'est rendu un meuble, icitte.

- Va chier! a dit Loco.

on regarde les étoiles
On revient trop l'année prochaine.  Préparées, inscrites, et avec une caméra vidéo cachée dans un animal empaillé.  Oh que oui.  Puis on est reparties à Montréal, sur le coup de minuit, comme deux belles Cendrillon dans nos grandes robes.  Et on est pas retourné en ville sans d'abord s'être arrêté sur le bord de la 153, étalé une couverture champêtre sur le capot de l'auto et regardé les étoiles en mangeant un brie qui goûtait le sperme.  Une belle, belle nuit, qu'on a passé.


Karine et le brie spermique

 


p.s. merci à mes voisins qui se sont achetés un feu de camp en métal et qui en ont fait un live là, quand j'ai écrit mon activité 20.  J'me sentais dans l'ambiance.




p.p.s. pour les deleted scenes, allez voir sur http://www.33mag.com/, section magazine!